Le silence affiché par les deux lauréats du Prix Nobel de la Paix (Denis Mukwege en RDC et Aung San Suu Kyi en Birmanie) face à des crises majeures dans leurs pays respectifs devrait attirer l’attention du public quant à leurs mérites ; ce qui pourrait entacher aussi, si ce n’est déjà pas le cas, l’image de l 'organisation en charge de décerner le prix Nobel de la paix. L’attitude adoptée par lesdits lauréats est sujet à caution quant aux honneurs reliés à ce prix de grande valeur à l’échelle mondiale.
En effet, durant les crises humanitaires qui secouent les deux pays, les deux lauréats du Prix Nobel de la Paix, contrairement aux attentes, se sont illustrés par un silence complice face au drame que vivent les communautés minoritaires, les Banyamulenge au Congo et les Rohingya en Birmanie, toutes les deux victimes de ségrégation et dont les membres sont traités d’éternels étrangers dans leurs propres pays et menacés d’extermination par leurs compatriotes.
La seule différence entre les deux situations est que, sous le feu des critiques de la communauté internationale pour son silence sur le sort de la minorité Rohingya et son soutien aux exactions de l’armée contre celle-ci , Aung Suu Kyi a essayé tant bien que mal de donner l’impression de se ressaisir et de s’intéresser à la question des Rohingya qui venaient d 'être chassés par l 'armée et contraints de fuir massivement vers le Bangladesh au motif que leurs ancêtres lointains y sont provenus. Force est de constater que la mobilisation de la communauté internationale peut changer des situations catastrophiques qui pèsent sur des minorités à travers le monde et qu’au contraire son laisser- faire risque de conduire à nouveau à des génocides que l’humanité a connus dans le passé.
Quid du Dr Mukwege!
Son aveuglement aux tueries des Banyamulenge laisse planer le doute sur son engagement en faveur de la paix. Comme à l’endroit de Madame Aung Suu Kyi, espérons que la communauté internationale pourra s’impliquer activement pour faire comprendre au Dr Mukwege que ses prises de positions en faveur des Milices Mai-Mai vont à l’encontre des principes et valeurs universels des droits de l’homme, ne serait-ce que pour sauver l’honneur du Prix Nobel censé récompenser les plus méritants. Trois ans durant, Dr Mukwege s’est résolu à un mutisme devant une tragédie qui a détruit la quasi-totalité des terroirs de Banyamulenge, faisant des centaines des morts, des centaines des milliers de vaches razziées. Dr Mukwege, un ressortissant du Sud- Kivu connait sans doute que ces tueries sont l’œuvre des Maï-Maï issus des tribus Bembe, Banyindu et Fuliru en coalition avec des groupes armés étrangers en l’occurrence Red Tabara et FNL auxquels se sont joints des éléments de l’armée régulière.
Au tour de Kipupu, le village Bembe qui a connu dernièrement des affrontements en son sein entre Twirwaneho, (une organisation d 'auto-défense des Banyamulenge), plus de 40 villages banyamulenges avaient été incendiés auparavant par des miliciens Mai Mai.Il convient de préciser qu’à ce jour, sur l’ensemble des terroirs des Banyamulenge, l’on compte au tour de deux cent villages complétement détruits. La perte en vies humaines et la destruction de biens des Banyamulenge sont d'une telle ampleur que les gens ne rendent plus compte. Trop de douleurs rendent le corps insensible dit-on. Est-ce bien ce qui est arrivé aussi au Dr Denis Mukwege ? A la lumière de son message au sujet de Kipupu, tout indique qu’il a délibérément choisi de prendre fait et cause pour les Maï-Maï et alliés et donc pour ceux qui prônent la politique de l'épuration ethnique et de déracinement du peuple Banyamulenge du Congo qu’ils voudraient voir retourner au Rwanda d 'ou seraient partis leurs ancêtres.
Rappelons au passage que le village de Kipupu qui abritait les assaillants Maï-Maï Bembe a fait l’objet d`affrontement entre ces derniers et des jeunes Banyamulenge. Ceux-ci ont pourchassé les assaillants venus attaquer leur village de Kalingi jusqu’ au niveau de Kipupu, opération qui leur a permis de récupérer une partie de leurs vaches que les assaillants avaient emportées la veille. Ces attaques à deux reprises sur le village de Kalingi ont fait deux victimes parmi la population civile. Quelques semaines plus tôt, un camp des déplacés internes de Mikenke avait fait l’objet de deux attaques successives meurtrière menées par des Maï-Maï provenant de Kipupu et de ses environs.
Dans cette tragédie qui dure plus de trois ans, un fait inédit mérite d’être souligné.
Au début de la crise, des éléments des forces armées en complicité avec des Maï-Maï participaient au trafic des vaches volées. Cela ressemblait aux tracasseries auxquelles s’adonnent souvent des militaires à cause de leur situation financière précaire. Mais la tournure des événements a montré par la suite que ce n’était pas dû à cette situation de crise financière qui touche particulièrement les militaires congolais. Il s’agit plus tôt d’un plan de déracinement minutieusement préparé et en cours d’exécution.
Qu` est ce qui s’observe par rapport à l’approche adoptée par les deux lauréats dans les situations de crise décrites plus haut. Il y a lieu de déduire qu’ils simplement q ils ont failli au principe légué par Albert Nobel lui-même, selon lequel le prix Nobel devrait récompenser une personnalité ou une communauté qui aurait le plus contribué au rapprochement des peuples, à la suppression ou réduction des armées permanentes, la réunion et à la propagation des progrès pour la paix.
Au sujet d 'armées permanentes, si l'armée dans le contexte actuel n’en fait pas partie, du moins dans l’exercice de sa mission régalienne dont malheureusement elle s’est détournée dans la tragédie imposée aux Banyamulenge ; le Dr Mukwege est au courant de la présence d’autres types armées sur les terroirs de Banyamulenge dont les Maï-Maï, Red Tabara et FNL. Leur cible commune étant le Munyamulenge, que fait-il donc pour dénoncer le sort qui lui est réservé ? Il préfère en revanche lui tourner le dos, et comme si cela ne lui suffisait pas, il a décidé de passer à la vitesse supérieure en dissimulant le sort des victimes. Les victimes Banyamulenge passent pour des bourreaux, et ce dans l’objectif de couvrir les actes de génocide que commettent les Maï-Maï et alliés et ainsi détourner l’attention de la communauté internationale sur les souffrances des populations Banyamulenge.
R. Mibari Boniface Sociologue/ Diplômé de l’université de Kisangani.
bmibari@gmail.com
Le massacre de malades à l'hôpital à Lemera était déjà pour préparer cet article ? Rapport Mapping, page 139. Le 6 octobre 1996, des « éléments armés banyamulenge/tutsi » ont tué plus d’une cinquantaine de personnes dans le village de Kidoti. Le 6 octobre 1996, dans le village de Lemera, à 80 kilomètres au nord-ouest d'Uvira des « éléments armés banyamulenge/tutsi » ont tué 37 personnes dans un hôpital, parmi lesquelles deux membres du personnel médical, des civils et des militaires des FAZ en traitement à l’hôpital. Avant de quitter Lemera, les « éléments armés banyamulenge/tutsi » ont saccagé l’hôpital