Mon point de vue à propos de la Déclaration de PHR sur ce qu’ils appellent « intimidation et menaces contre le Dr Denis Mukwege, défenseur des droits humains et colauréat du prix Nobel de la paix»
Ce n’est pas ce qu’on a l’habitude d’entendre ou de lire de la part d’une institution de défense des droits humains. Mais c’est désormais ce que nous constatons à travers la déclaration de Physicians for Human Rights, PHR, en sigle.
Si ce communiqué s’intéresse à la sortie médiatique du Général Rwandais James Kabarebe, il intervient comme une suite logique et programmée, comme un film en séries, aux précédents messages de la part d’une bonne fourchette de porte-paroles de Dr. Mukwege, à l’instar de son beau-frère Musimwa B. Partiel devenu Israël. Une prise de position et une défense acharnée pour un homme dont un appel par la communauté Banyamulenge pour sa neutralité et son impartialité dans le conflit qui les opposent à la funeste coalition Milice MAI-MAI et groupes armés étrangers a miraculeusement sonné comme une menace à sa sécurité.
On a l’impression que depuis sa consécration au Prix Nobel de la Paix en 2018, Dr. Mukwege est né dans un monde guindé et orgueilleux où l’homme n’est plus faillible, où l’on se croit déshonoré parce qu’un commun de mortel, quoi qu’il y aille par le dos de la cuillère, ose lui rappeler que l’impartialité fait partie des vertus d’un digne Prix Nobel de la Paix. Dr. Mukwege est donc devenu ce genre de personnages qui se braquent à la moindre de friction, à la moindre remarque. Ne pas être d’accord avec lui ou ne pas se montrer admiratif pour son geste, maladroit soit-il, suffit pour le voir partir dans une cascade de plaintes pour sa sécurité personnelle et parvenir ainsi à échapper de porter une quelconque casquette du coupable !
C’est probablement pour cela que Physicians for Human Rights (PHR) - sur lequel désormais la vie de Dr. Mukwege semble se rythmer - veut éviter pour son protégé, le discrédit que pourrait lui apporter sa mauvaise opération de soutien aux criminels MAI-MAI par son Tweet du 26 juillet 2020. Un tweet aux allures injurieuses et narquoises contre les victimes des barbaries de tous genres et dont les effets produits semblent l’empêcher de jouir pleinement de son prestige.
Le discours du Général Kabarebe me préoccupe moins. Mais on ne peut que s’étonner de constater que quand les membres de la communauté Banyamulenge se font l’audace de signifier au Prix Nobel de la Paix que face à la situation sécuritaire de Hauts et Moyens-Plateaux du sud Sud-Kivu, son discours se devait d’être non partisan, son équipe réagit comme sous l’effet d’une brûlure. Quand on ose lui rappeler que les enfants de femmes Banyamulenge tuées (après viol et mutilation de leurs seins et organes génitaux) attendaient en vain du « Réparateur de femmes » un geste de condamnation de ces actes barbares, les soi-disant voix de sans voix se lèvent au service de Dr. Mukwege, comme s’ils attendaient qu’on leur tende cette perche exceptionnelle pour sortir de leur cage et se lancer ainsi dans une dérive de fausses et imaginaires accusations!
Une clé en or ouvre toutes les portes, dit-on. Et comme on a touché au Dr. Mukwege, l’organisation internationale PHR sort aussi ses griffes et se lance avec avidité dans cette bataille, somme toute en faveur de MAI-MAI et de facto, contre les Banyamulenge. Mais pour y parvenir, PHR se doit de se déguiser et de détourner l’attention des intéressés en appelant à une action urgente pour Dr. Mukwege et son entourage pour lesquels, par une magie de fiction, la sécurité est en danger. PHR rappelle donc, à celui qui veut l’entendre que, je cite : « En tant que partenaire de longue date du Dr Denis Mukwege, chirurgien congolais renommé, co-lauréat du prix Nobel de la paix 2018, fondateur et directeur médical de l’hôpital de Panzi, dans la province du Sud-Kivu en République démocratique du Congo (RDC), Physicians for Human Rights (PHR) appelle de toute urgence à une action immédiate pour protéger celui-ci, les membres de sa famille, ses patient(e)s et le travail essentiel du personnel de l’hôpital de Panzi ».
Par ce message, l’organisation PHR met tout le monde en droit de se demander quel danger le Dr. Mukwege, son staff et ses clients/ malades courent pour que toute la machine s’emballe autour de d’eux ? De quelle manière un appel au respect des valeurs de neutralité pour un Prix Nobel de la Paix se transforme-t-il en une menace pour sa sécurité ? Pour qui finalement une telle organisation de droits humains travaille-t-elle si ce n’est désormais qu’à la solde d’un seul homme, le Dr. Mukwege ; ce Prix Nobel de la Paix qui ne s’agasse pas de bousculer les codes lui imposé par son statut dans le seul but d’attirer vers lui une attention proche de la sacralisation.
En effet, consciente que le silence dont elle s’est illustrée vis-à-vis de barbaries que connaissent les Banyamulenge n’a pas suffi pour assurer le déracinement total de ces derniers, cette illustre institution de DH devait rajouter, en sa manière et avec ses outils appropriés un nouveau tour de vis. Une façon de davantage resserrer l’étau et d’assurer que cette communauté, déjà blessée par les tirs de canons par les MAI-MAI et alliés est achevée complètement ! Sinon, vaut-il encore la peine ici de rappeler que trois ans de galère sont passés sans que l’on entende la moindre intervention de PHR sur ces atrocités contre la communauté Banyamulenge ? PHR n’est-il pas au courant que depuis plus de trois ans les miliciens MAI-MAI sont en alliance avec des groupes armés étrangers pour faire des Hauts et Moyens Plateaux de Fizi, Mwenga/Itombwe et Uvira leur nid ? PHR ne sait-il pas qu’il s’agit de trois ans pendant lesquelles cette funeste alliance endeuille au quotidien et de manière sélective les familles de la seule communauté Banyamulenge, et ce dans l’indifférence et l’impunité totale ? Trois ans sans que cette meurtrière alliance ne soit dénoncée, ni par le Prix Nobel de la Paix, ni par ses porte-paroles, et moins encore par PHR ? Où était donc cachée PHR, pourtant à pied d’œuvre au Sud-Kivu depuis plus d’une décennie comme précisé dans son message ?
Dans cette même déclaration pourtant, PHR n’hésite pas d’affirmer, je cite « continuer de soutenir la fin de l’impunité en RDC pour les crimes internationaux de violences sexuelles, de pillage et de meurtre ». C’est à se demander si ce soutien pour la fin de l’impunité, une fois orienté en faveur des Banyamulenge victimes des crimes graves, était synonyme d’entraîner PHR en dehors de son champ d’action et de ses termes de référence. Sinon, à moins qu’il s’agisse d’une désinformation ou d’une distraction de sa part, la vie de Banyamulenge ne compte pas !
Le 15 dernier, on a appris sur la voix des ondes qu’un conflit aurait opposé les fractions MAI-MAI Yakutumba et Biloze Bishambuke sans préciser la cause exacte du conflit. En effet, il s’agissait en réalité d’une dispute survenue à la suite d’un désaccord sur le partage des vaches razziées par ces derniers dans les Moyens-Plateaux de Fizi. Un malheureux événement, mais qui pouvait éventuellement laisser ces MAI-MAI passer quelques jours à se préoccuper de régler leur différend, et à donner ainsi un peu de répit aux familles Banyamulenge cibles de leurs attaques régulières et incessantes. Bien avisé, Dr. Mukwege et PHR s’en sont-ils éventuellement rendus compte et réalisé qu’il était opportun de lancer ce message en guise de rescousse additionnelle dont ces MAI-MAI avaient probablement besoin pour vite reprendre leurs meurtrières opérations !
En réagissant de manière spontanée et épidermique aux attaques de Kipupu par un appel à la justice contre « ces mêmes qui continuent de tuer depuis 1996 », Dr. Mukwege a ainsi signé en avance une accréditation de massacre supposée, sans vérifications ou enquête préalable. Il s’est aussi empressé à pointer les auteurs et est soutenu dans cette démarche par ses protecteurs. Mais par ces gestes, le Prix Nobel de la Paix et ses soutiens devraient s’apercevoir qu’ils nagent dans une flaque de sang et de larmes des orphelins, des veuves et des veufs Banyamulenge endeuillés par les MAI-MA. Et par leurs réactions, ils font ouvertement savoir au monde que leur vif souhait était que ces orphelins Banyamulenge, désormais privés de tout, en dépérissement inquiétant de leur santé meurent de malnutrition après que les vaches qui les nourrissaient par le lait qu’elles produisent soient emportées et emmenées à Kipupu, le fief des MAI-MAI où ces derniers ont pris quelques civiles en boucliers humains et où enfin les Twirwaneho sont allés chercher ces vaches razziées. Tant pis pour ces orphelins et ces veuves, pourvu que Dr. Mikwege et ses acolytes en profitent pour s’engraisser à leurs dépens, dans leur confort du Prix Nobel de la Paix ! En effet, puisque, ces derniers ne se lassent pas, d’une part de jouer à la dénonciation de délits imaginaires en ce qui concerne la sécurité du Dr. Mukwege, et d’autre part, de donner le ton à ceux qui s’emploient toujours à vendre une mauvaise image de Banyamulenge, il ne faut pas non plus se lasser de le dénoncer et s’atteler à la tâche de le réfuter.
Certes, les défenseurs et porte-paroles de Dr. Mukwege insistent sur le fait qu’en parlant de Kipupu, ce dernier n’a en aucun cas fait mention du nom de Banyamulenge. Mais de qui d’autres voulait-il parler quand on sait que les affrontements de Kipupu opposaient les bouviers et ces écorcheurs MAI-MAI vivant en bandes de pillards qui ont razzié les vaches appartenant aux Banyamulenge, à Kalingi quelques jours avant ? Dr. Mukwge a beau jouer à la victimisation - un comportement qui par ailleurs, lui a valu plutôt ses honneurs actuels que l’opprobre, son discours reste on ne peut plus clair. Une affabulation qui ne manquerait donc pas de faire réagir le groupe de population visée ! Un proverbe africain dit que « qui crache en l'air reçoit tout à la figure » !
Si les Banyamulenge se plaignent de la naïveté du gouvernement à stopper la menace qui la guette, une naïveté révélatrice d’une crise de confiance profonde envers les autorités politiques et militaires, elle ne s’était pas rendu compte, en tout cas, jusqu'à la publication de la déclaration de PHR, qu’une institution aussi crédible de droits humains, aussi discrète soit-elle vis-à-vis de sa situation, puisse prendre position et se ranger derrière la coalition de la milice MAI-MAI et groupes armés étrangers qui écument les Hauts et Moyens-Plateaux de Fizi, Mwenga/Itombwe et Uvira.
Certes, tout le monde a besoin de la protection, une protection pour tous. La communauté Banyamulenge, toute minoritaire soit-elle, a besoin aussi de cette protection tant sollicitée par PHR. Elle a besoin de savoir pourquoi elle est la cible d’une épuration ethnique par une coalition régionale ( MAI-MAI, Red Tabara, FNL) qui n’émeut personne. Elle a besoin aussi que cesse l’impunité et donc, besoin de la justice. Eventuellement une justice à laquelle PHR et Dr. Mukwege devraient aussi faire face pour n’avoir pas osé lever leur doigt quand il s’est agi des crimes contre les Banyamulenge, contre les femmes Banyamulenge dont les corps ont été impunément déchiquetés par les MAI-MAI.
PHR et Dr. Mukwege devraient se rappeler, comme disent les sages africains, que le soleil qui brille n'ignore pas un village parce qu'il est petit !
Kinshasa, le 25 août 2020
Mukulu Le Patriote
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