Goma est en deuil ! Et ce après que plusieurs dizaines de personnes ont trouvé la mort lors d'une manifestation qui se voulait pacifique contre la Mission de maintien de la paix de l'ONU en RDC (MONUSCO), dont le bilan, de l'avis des manifestants, est plus que négatif, voire catastrophique.
Des vidéos et messages audio décrivant la tragédie passent en boucle sur les réseaux sociaux. Contre les manifestants portant la fétiche casquette de Wazalendo (patriotes) à Goma, ce 30 août 2023, les forces de l’ordre ont fait une truculente démonstration de leur capacité à couper l’herbe sous les pieds des organisateurs des manifestations. Des médias locaux (qui pleurent entre-autres la mort des journalistes en marge de la manifestation) rapportent que des balles réelles ont été tirées sur les foules et que plusieurs personnes ont été matraquées ou arrêtées.
Dans les rangs de la société civile du Nord-Kivu - particulièrement acquise à la décision du gouvernement de conférer le statut des forces réservistes au collectif des groupes armés Maï- Maï baptisés patriotes Wazalendo pour l’occasion - on rivalise de superlatifs pour décrire la barbarie. Certains condamnent un « carnage », d’autres s'insurgent contre une « boucherie », d’autres encore fustigent « un massacre » et « une nouvelle étape dans le processus de la Balkanisation du pays ».
Mais de tout ça, un constant est troublant laisse les Congolais dubitatifs : si l’horreur a eu une véritable onde de choc au sein de la population de Goma et de tout le Nord-Kivu, elle ne semble pas préoccuper les traditionnels lanceurs d’alerte sur les massacres/ assassinats auxquels la population congolaise est constamment soumise. De Denis Mukwege (Prix Nobel de la Paix) à Nzangi Muhindo (Ministre national et élu de Goma) en passant par Justin Bitakwira (porte-parole et autorité morale des Wazalendo), on reste discret ; comme si le spectacle a eu le mérite de n'attrister que les familles biologiques des disparus !
Pourquoi alors ceux qui ont élevé la voix pour condamner le massacre de Kishishe (au Nord-Kivu) n’osent pas s'alarmer de l'impressionnant macabre bilan de la répression, dans le sang de la manifestation du 30 août à Goma ?
Cela n’a rien d’étonnant et à cette question, la réponse est simple. En pareilles circonstances en effet, les activistes congolais optent pour un algorithme particulier d'analyse du crime. Celui-ci s’articule autour de trois critères dont l'application permet de (re)qualifier les faits et de déterminer ainsi la conduite à tenir. Par les trois critères on note (1) des bonnes et mauvaises victimes, (2) des bons et mauvais bourreaux, (3) des bons bourreaux et des bonnes victimes. Comment alors cela s'applique ?
Les Bitakwira et consorts crient au massacre et allument la mèche d'une révolte généralisée lorsque les mauvais bourreaux (tutsis) sont accusés de tuer les bonnes victimes (non-tutsis). Ils restent de marbre lorsque les bons bourreaux (Wazalendo, FARDC et FDLR) s'adonnent ou assistent aux massacres contre les mauvaises victimes (tutsis) dont les églises ont été détruites à Goma, le 06 février 2023, par les mêmes manifestants et dans l’indifférence totale des FARDC et de la MONUSCO. De ce fait, un massacre reste un fait divers lorsqu’une catégorie de bons bourreaux en a attaqué une autre ou si celle-ci s'en est pris aux bonnes victimes. Ce qui est le cas de la tragédie de Goma.
Quant à la communauté internationale (MONUSCO et ONG internationales) ciblée par les manifestants fauchés, elle est embarrassée et en dilemme éthique. Connue logiquement pour plaider la cause des victimes (bonnes ou mauvaises victimes), elle est surtout moins bien placée pour dénoncer les FARDC qui ont œuvré pour l'épargner de la rage des manifestants, lui servant ainsi d’une planche de salut.
Quoi qu'il en soit, le phénomène Wazalendo semble souffrir du syndrome de Frankenstein où le monstre se retourne contre son créateur. Il a donc tendance à devenir un casse-tête pour le gouvernement qui s'est laissé piéger par ceux qui font la guerre contre les tutsis. Il ne suffit pas d'être rôdé en politique pour constater que les choses tournent à l'envers et contre toutes les prévisions.
02 septembre 2023
Mukulu Le Patriote
Quelle sagesse! Cet article me fait penser à bcp des choses. Les wazalendo sont des bandits operant en pleine jrnée soutenus par le régime de Fatshi. Je n'ai pas le temps de pleurer pour ces feticheurs et coupeurs de route qui ont recoltés ceux qu'ils ont semés.