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L’ours (Idubu) convient-il comme emblème de Twirwaneho ?

Dernière mise à jour : 26 mars

A. Les Animaux comme Emblèmes : Origines, Critères et Symbolisme


Depuis l’Antiquité, les animaux ont été utilisés comme emblèmes pour représenter des nations, des clans, des institutions ou des idéaux. Cette pratique repose sur des croyances culturelles, des qualités symboliques attribuées aux animaux et leur capacité à inspirer respect et admiration. Mais pourquoi les animaux sont-ils choisis comme emblèmes ? Quels critères déterminent leur sélection ? D’où vient cette tradition ? Et est-il possible d’adopter un animal exotique comme emblème ?


1. Pourquoi les animaux sont-ils utilisés comme emblèmes ?

Les animaux sont des symboles puissants, souvent associés à des qualités humaines ou des forces naturelles. Leur utilisation comme emblème permet d’incarner des valeurs et d’exprimer une identité forte. Par exemple :

  • La force et la puissance : Le lion est un emblème populaire, souvent choisi pour représenter le courage et la royauté (ex. : le lion de l’Angleterre ou celui de la Belgique).

  • La sagesse et la prudence : La chouette, emblème d’Athéna dans la Grèce antique, symbolise la sagesse et la connaissance.

  • La liberté et la grandeur : L’aigle, utilisé notamment par les États-Unis et l’Empire romain, incarne la souveraineté et la vision à long terme.


En outre, certains animaux sont associés à des mythes fondateurs ou à des croyances religieuses, renforçant ainsi leur rôle emblématique.


2. Quels sont les critères de sélection d’un animal emblématique ?

Le choix d’un animal pour un emblème repose généralement sur plusieurs critères :

  1. Les caractéristiques symboliques : L’animal doit représenter des qualités ou des valeurs que l’institution ou la nation souhaite incarner.

  2. La présence géographique : Un animal typique d’une région est souvent privilégié pour renforcer l’identité locale (ex. : le coq en France, l’ours en Russie).

  3. L’histoire et la culture : Certaines figures animales sont liées à des événements historiques ou des traditions. Par exemple, le dragon chinois représente la force et la prospérité depuis des siècles.

  4. L’impact visuel et émotionnel : Un animal impressionnant ou facilement reconnaissable est plus efficace pour marquer les esprits.

  5. L’universalité du message : L’animal choisi doit être compris de tous et éviter des connotations négatives.


3. D’où vient cette tradition ?

L’usage des animaux comme emblèmes remonte aux civilisations anciennes.

  • Égypte antique : Les dieux étaient souvent représentés sous forme animale (Anubis le chacal, Horus le faucon).

  • Empire romain : L’aigle impérial symbolisait la puissance militaire et la domination.

  • Moyen Âge européen : Les armoiries des familles nobles arboraient des animaux pour représenter leur lignée et leurs vertus (ex. : le loup, la licorne).

  • Cultures asiatiques africaines et amérindiennes : Les totems et les symboles animaux étaient utilisés pour incarner des esprits protecteurs.


Avec le temps, cette tradition a évolué et s’est adaptée aux institutions modernes (blasons nationaux, logos d’entreprises, mascottes sportives, etc.).


4. Peut-on avoir un animal exotique comme emblème ?

Il est possible de choisir un animal exotique comme emblème, mais cela dépend du contexte :

  • Si l’animal correspond aux valeurs uniques recherchées : Par exemple, le panda géant est l’emblème du WWF bien qu’il ne soit pas présent partout dans le monde.

  • Si l’animal a une portée universelle : Certains pays adoptent des animaux qui ne sont pas endémiques mais qui portent un message fort (ex. : le phénix, symbole de renaissance).

  • Si l’animal est lié à une histoire ou une influence culturelle : Par exemple, le lion est l’emblème de plusieurs nations africaines bien qu’il ne soit pas propre à un seul pays.

Cependant, le choix d’un animal non endémique peut susciter des débats. Un emblème est souvent plus pertinent lorsqu’il est enraciné dans l’histoire et la faune locale.


En fin de compte, l’utilisation des animaux comme emblèmes est une tradition ancienne qui repose sur leur symbolisme et leur pouvoir évocateur. Le choix d’un emblème animalier suit des critères précis liés à l’histoire, à la culture et à la géographie. Si un animal exotique peut être adopté, il est généralement préférable d’opter pour un symbole en adéquation avec l’identité de la communauté ou de l’institution qu’il représente. En définitive, les animaux continueront d’être des figures emblématiques, traversant les époques et les civilisations comme des symboles intemporels.

 

B. L’ours (Idubu) comme emblème de Twirwaneho : un choix légitime ?


Peu avant sa disparition, le général Michel Makanika Rukunda, figure emblématique et héros des Banyamulenge, avait prononcé un discours marquant lors des obsèques d’un camarade tombé au combat. Dans son allocution, il cita un passage biblique en déclarant : « Nous nous battrons comme un ours qui défend ses petits » (Tuzorwana nk’amadubu arwanira abana bazo). Cette phrase a rapidement circulé au sein de la communauté, au point que le terme Idubu (ours) semble progressivement s’imposer comme l’emblème du mouvement d’autodéfense Twirwaneho.

L’adoption de l’ours (Idubu) comme symbole de Twirwaneho soulève plusieurs interrogations. Si le général Michel Makanika Rukunda a bien évoqué l’image d’un ours défendant ses petits dans l’un de ses discours, il ne s’est jamais adressé à ses hommes en les désignant par ce terme. Il s’agissait simplement d’une métaphore biblique, et s’il avait voulu faire de l’ours un emblème de son mouvement, il l’aurait sans doute fait bien plus tôt.

De plus, l’ours est un animal peu connu sous les latitudes africaines. Principalement présent dans les régions polaires et tempérées, il en existe plusieurs espèces aux comportements variés : certains sont herbivores, d’autres omnivores et d’autres strictement carnivores. Bien qu’il soit un super prédateur au pôle Nord où il n'y a pas de concurrents, il reste moins puissant que des félins emblématiques tels que le lion ou le jaguar, qui symbolisent depuis toujours la force et la souveraineté dans de nombreuses cultures africaines.

L’origine de l’association entre Idubu et Twirwaneho semble plutôt résulter d’un malentendu. En effet, le terme a pris de l’ampleur après une réaction émotive d’une femme courageuse qui fut la première à aller à la rencontre du M23 lors de la libération de Bukavu. Voulant citer Makanika, elle a confondu le mot Idubu (ours) avec Imvubu (hippopotame). Ce n’est qu’après de nombreuses recherches que l’on a découvert que le terme Idubu pouvait effectivement désigner l’ours.

Ainsi, la question demeure : un symbole né d’une confusion et représentant un animal étranger au contexte africain est-il véritablement adapté pour incarner Twirwaneho ? Ou ne serait-il pas plus pertinent de s’en tenir aux emblèmes traditionnels, comme le lion (Intare) ou l’aigle (Kagoma), qui portent en eux une signification profondément enracinée dans l’histoire et l’identité des Banyamulenge et qui portent déjà une forte résonance dans notre culture et notre combat, plutôt que d’adopter un emblème étranger à notre contexte? Reflechissez-y.


le 26 mars 2025

Paul Kabudogo Rugaba

 
 
 

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