Le camouflet infligé aux MAI-MAI par le groupe Twirwaneho dans l’opération de récupération de vaches razziées, et conduites dans le village de Kipupu s’est transformé en une véritable tribune de réactions, de critiques, d’accusations et de contre-accusations. Certes, la nouvelle est tombée comme un coup de massue sur les têtes des instigateurs du conflit, déclenchant ainsi des réactions de tout poil qui fusèrent de partout et qui s’enchaînèrent à profusion. Probablement parce que, pour les uns, notamment ceux qui tirent profit du trafic des vaches razziées, c’est du biftèque qui venait de leur être retiré de la bouche. Tandis que pour d’autres dont la haine contre les Banyamulenge a atteint son paroxysme, c’est un grave revers subi sur le théâtre d’affrontements.
Dans mon dernier article sur la question, j’ai tenté de faire remarquer que derrière les MAI-MAI se cachent d’autres agitateurs du conflit dont l’issue escompté n’est autre que le déracinement de Banyamulenge dans les trois territoires de leur ressort dont Mwenga, Fizi et Uvira. C’est à peine que mon texte a été partagé sur les réseaux sociaux que je me rendis compte que j’étais loin d’être exhaustif, tellement chaque jour apporte son lot de découvertes sur les tireurs de ficelles dans ce conflit qui gangrène la vie de toute une communauté.
Faisant parler d’elle, l’opération de Kipupu continue ainsi de mettre à nu les acteurs du conflit, pourtant longtemps cachés. En effet, après la surprenante réaction d’honorables députés provinciaux du Sud-Kivu, pourtant longtemps restés dans leur réserve sur les crimes contre les Banyamulenge, c’est le mouvement Citoyen Filimbi ainsi que des personnalités telles que Mr. Fayulu et Dr. Mukwege qui s’invitent dans la danse, gonflant ainsi le rang d’acteurs auxquels j’ai fait allusion dans mon dernier article.
Il est donc important de se saisir de ces intempestives sorties médiatiques pour montrer combien les réactions des uns et des autres sont étroitement liées pour faire échec à toute initiative visant à sécuriser les Banyamulenge et à restaurer leur dignité.
En effet, que sait-on, sinon que peut-on retenir de ces déclarations ainsi que de leurs auteurs ?
Je me permets ici de présenter mes observations, non pas dans un ordre quelconque de priorité, mais selon un déroulement logique :
1. Fayulu n’a pas voulu faire passer cette occasion pour soutenir cet élan de solidarité pour les MAI-MAI
Les limites de la non-assistance pour les Banyamulenge meurtris par les affres de guerre leur imposée par les MAI-MAI n’ont pas bougées avec les nouvelles capacités de communiquer sur la question. Au contraire, elles ne font que se renforcer.
En effet, dans sa déclaration sur les événements de Kipupu, Fayulu condamne les « massacres de 220 personnes » dont il est pourtant incapable de prouver la véracité des faits.
On peut donc se demander où était Fayulu pendant ces trois dernières années au cours desquelles les Banyamulenge n’ont cessé de dénoncer la maltraitance dont ils sont victimes. Quoi qu’il en soit, il est difficile de comprendre les réelles motivations du leader de Lamuka. On peut supposer que dans sa recherche désespérée du pouvoir, Mr. Fayulu, le candidat malheureux aux présidentielles de 2018 trouve en l’opération de Kipupu un nouveau terrain pour ses opérations-séduction. Il cherche éventuellement à gagner en populisme ce qu’il a perdu dans les urnes. Sa réaction laisse croire que dans son incapacité à se remettre de son échec électoral, Fayulu ne peut que se contenter de se faire le plaisir de se torturer l’esprit avec des farfelues déclarations qui n’auraient aucune incidence positive, ni sur son positionnement politique, ni sur l’issue du conflit de Minemwe, si ce n’est que l’exacerber.
Bref, par cette sortie médiatique, Mr. Fayulu s’illustre comme une énième batterie de la machine infernale qui ne cesse de mitrailler sur la cible facile. Sous entendue, les Banyamulenge.
2. Le Dr. Mukwege n’a pas manqué d’en rajouter une couche
La seule évocation du nom de Dr. Mukwege fait penser à ces milliers de femmes violées et réparées par cet illustre gynécologue de l’hôpital de Panzi. Un combat acharné qui lui a valu les honneurs du Prix Nobel de la Paix.
En revanche, et pour rappel, trois femmes Banyamulenge ont été kidnappées et séquestrées par les MAI-MAI à Minembwe. Elles ont été violées et leurs parties génitales mutilées. De cette macabre histoire, on penserait à un conte de fées tellement le degré de violence subi par ces femmes, dont deux mortes et une survivante, sont sans commune mesure. Il n’en est pourtant pas le cas ! En date du 20 avril 2010, la survivante a été présentée au bureau local de la MONUSCO et les corps de deux victimes exposées à cette occasion.
Dr. Mukwege a surement été au courant de la triste nouvelle. Il n’a pas osé élever sa voix pour fustiger ces barbaries hors-pair. Il a fallu attendre que les vaches pillées par les MAI-MAI soient récupérées et restituées aux propriétaires pour que le « réparateur de femmes » sorte de son silence et condamne un pseudo-massacre dont il ignore carrément les détails et dont aucune preuve matérielle ne lui ait été fournie.
Ce comportement affiché par le Prix Nobel de la Paix suggère que la lutte contre le viol reste son cheval de batail, pourvue que celui-ci ne soit perpétré contre les femmes Banyamulenge ! En effet, en cette période où la barbarie fait sa loi, où les crimes et les violences abondent, où le plus grand désordre règne, où la paix est incessamment troublée dans cette partie de l'Est de la RDC, une aussi haute personnalité, qui brille du plus grand éclat ne mérite pas de s'illustrer par cette choquante prise de position. On attendrait de lui, plutôt un certain idéal de neutralité, un type de vertu qui attirerait regards et respect. Sinon, c’est une honte. Et bien entendu, si la honte pouvait mouiller, le Prix Nobel de la Paix serait trempé de la tête aux pieds.
3. Le téméraire Mouvement citoyen Filimbi n’est pas en reste
Floribert Anzuluni, fils d’Anzuluni Bembe et chef de file du mouvement Citoyen Filimbi pour ce cas précis est, à son tour monté au créneau. Ce dernier qui ne s’est pas empêché d’exposer les symptômes du virus de la haine qui le ronge, est allé même à exiger l’annulation de la Commune de Minembwe. Il y a pertinemment lieu de rappeler ici que l’obsession de son père, Anzuluni Bembe, de nuire à la communauté Banyamulenge a eu pour conséquence, le développement du germe de haine et de méfiance entre les Banyamulenge et leurs communautés voisines.
On ne se serait pas tromper d’affirmer que l’insécurité chronique observée dans cette partie du pays depuis 2006 tire sa source dans le discours d’Anzuluni Bembe, alors président de l’Assemblée nationale de l’ex-Zaïre. A cette époque, l’honorable Anzuluni Bembe a invité les jeunes Babembe à se mobiliser pour chasser les Banyamulenge, les conduire au Rwanda et profiter de l’occasion pour « s’approprier/ manger » leurs vaches. Il a promis les moyens de l’Etat pour leur équiper en logistique nécessaire, dont les armes et minutions. On peut donc constater que cette haine viscérale contre le Banyamulenge, devenue patrimoine génétique pour la famille Anzuluni Bembe persiste et peut ainsi se transmettre du père en fils.
Chers compatriotes ;
Retenons que c’est par les armes que plus de 400 vaches ont été razziées par les MAI-MAI à Kalingi. C’est encore par les armes que ces vaches ont été récupérées par le groupe Twirwaneho dans le village de Kipupu. Mais force est de constater que, quand les armes ont parlé à l’occasion de pillage de ce cheptel, les acteurs ici identifiés se sont murés dans leur silence et dans le protectionnisme de rançonneurs MAI-MAI. Par contre, quand les mêmes armes ont parlé pour récupérer les vaches razziées, les concernés se sont mis à tirer à boulets rouges sur Twirwaneho en oubliant complètement et volontairement le rôle des MAI-MAI.
Bien entendu, si ces acteurs veulent éradiquer le phénomène de violence qui gangrène les Hauts et Moyen-Plateaux de Mwenga, Fizi et Uvira, ils devront nécessairement s’engager dès maintenant à ne pas attiser le feu de la haine et à ne pas présenter le bourreau en victime.
Kinshasa, le 29 juillet 2020
Mukulu Le Patriote
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