top of page
Rechercher
Paul KABUDOGO RUGABA

Déclaration de la Communauté Banyamulenge sur la situation des Hauts plateaux de Minembwe

Dernière mise à jour : 19 nov. 2020


La communauté Banyamulenge tient à porter à la connaissance de l’opinion tant nationale qu’internationale le plan de son extermination et de son déracinement en pleine exécution à Minembwe et sur tous les hauts plateaux qui s’étendent sur les territoires de Fizi, Mwenga et Uvira.

Elle dénonce vigoureusement ce plan qui se traduit par les massacres systématiques, l’attaque, l’incendie et la destruction totale des villages habités par les Banyamulenge et le pillage de leurs bétails. Cette barbarie est l’œuvre des groupes armés notamment Mai-mai Yakutumba, Ebwela, Aochi, Mulumba et Bilozebishambuke qui ont coalisé avec les groupes armés étrangers plus particulièrement les Forces nationales de libération du Burundi (FNL), la résistance pour un état de droit au Burundi ( Red tabara), la force républicaine du Burundi ( Forebu), etc.

A ce jour, on compte des centaines de personnes tuées, depuis que ce phénomène a commencé en 2017, plus de 160 villages et centres incendiés et détruits complètement : habitations, écoles, églises et centres de santé. La razzia a déjà emporté plus de 35.000 vaches de telle sorte qu’on ne sait plus compter étant donné que c’est chaque jour qu’ils attaquent, tuent, incendient, volent les tètes de bétail. Ce qui s’en suit ce sont les enterrements et les deuils.

Plus grave, ces attaques, tueries et razzia se font sous l’œil complaisant pour les uns et activement complices pour les autres, des unités des Fardc. Tous les villages de Mibunda dans le secteur d’Itombwe ont été détruits par les Mai-mai qui ont traversé les positions militaires en allant et au retour avec des centaines de milliers des têtes de bétail comme butin. Il y a des cas où d’une part, les mai-mai ont attaqué les villages où sont les militaires et ont tout brûlé sauf les cases des militaires. D’autre part, des cas sont légions où des civils ont fui vers les militaires, au lieu de les protéger, ils les ont frappés, chassés et livré leurs vaches aux Mai-mai.

Les militaires qui ne soutiennent pas ouvertement les mai-mai disent qu’ils n’ont pas reçu l’ordre de se battre et qu’ils ont été envoyés pour la sensibilisation. Et pourtant, ils ne sensibilisent personne surtout pas les colonnes de groupes armés qui viennent avec des armes d’appui.

Si au niveau national l’on peut évoquer des promesses, des engagements sans beaucoup de résultats, au niveau de la province le gouverneur n’a pris aucune initiative depuis, visiblement ce n’est pas son affaire. On se demande même s’il est au courant de ce qui s’y passe !


La communauté Banyamulenge dénonce le commandant de la 33ième région militaire, le général major Muhindo Akili alias Mundos qui est la plaque tournante du plan. Il n’est pas le seul. Il y a d’autres officiers qui sont avec lui dans ce deal meurtrier. Pour son compte il faut retenir les éléments ci-après :

1. Ce général est celui qui banalise ce qui se passe à Minembwe en donnant rapport à la hiérarchie selon lequel la situation est sous contrôle. Il le dit à qui veut l’entendre. En plus, il présente ce plan de massacre à grande échelle comme un conflit interethnique, et empêche les militaires de se battre en disant qu’il faut procéder au dialogue ;

2. Il est parvenu à convaincre que les militaires des Fardc issus de la communauté Banyamulenge ne doivent pas exercer dans cette zone, idée fort malencontreusement suggérée par certains éléments de la Monusco à Minembwe, le 16 mai 2019. Ils ont été tous retirés de la contrée sur base d’une stigmatisation liée au faciès. Il est regrettable de constater que cette mesure n’a été appliquée qu’aux seuls militaires issus de la Communauté Banyamulenge et avec quelle célérité ! Malheureusement, cette discrimination les poursuit partout où ils sont affectés ;

3. Comme si cela ne suffisait pas, il vient d’être donné l’ordre que tous les éléments de la Police Nationale Congolaise issus de la communauté Banyamulenge quittent les hauts plateaux sans délai. Il est malheureux de constater que les unités supposées être composées des militaires non originaires ont en leur sein des éléments issus des communautés voisines (les babembe, bafuliru et banyindu) mais aussi ils sont ceux là qui refusent de se battre et qui suivent les événements en spectateurs.

Retenez que ces militaires et ces policiers que l’on fait partir de Minembwe pour leur appartenance ethnique et tous les autres qui servent déjà la nation à travers la république appartenant à la même communauté, leurs villages ont été détruits, leurs vaches emportées, leurs parents ont été tués pour les uns, encerclés, traqués pour les autres par une coalition jadis ennemie de la nation aujourd’hui « sanctifiée ».

Sur ce tableau sombre, il convient d’ajouter ce drame toujours sur le plan militaire :

1. Les informations en notre possession indiquent que la brigade qui devait aller arrêter la guerre à Minembwe dispose de 3 bataillons. Un seul est arrivé à Minembwe, deux autres se trouvent toujours, l’un dans la plaine de la Ruzizi et l’autre à Bunia. C’est comme si rien ne presse. Ce bataillon de Bunia, semble t-il, attend un autre qui vendrait de Kindu pour le relever ;

2. Pourtant, le régiment qui était à Minembwe a été sommé de quitter sans délai et sans relève pour être envoyé à Kalemie où il n’y a ni guerre, ni une quelconque urgence ;

3. Les militaires présents sur terrain refusent de se battre ni de protéger la population et leurs biens. Ils laissent faire sauf lorsqu’ils sont attaqués directement.

Toutes ces stratégies sont préparées quelque part pour faire aboutir le plan et le général Mundos est la partie visible de l’iceberg vu sa position à la tête de la 33ieme région militaire.

Il faut souligner que la stratégie de brûler les villages, groupement par groupement, secteur par secteur et territoire par territoire vise à concentrer toute la population Banyamulenge dans le seul centre de Minembwe avant de passer à l’assaut final. C’est ainsi que plus ou moins 50.000 âmes sont déplacées vers les quelques villages restant autour du centre de Minembwe. Non seulement elles dorment à la belle étoile sous la pluie, exposées à la rigueur du climat des montagnes dont les températures descendent parfois en dessous de zéro, sans assistance, tous leurs biens (habits, nourriture et équipements ménagers) étant partis en fumée mais aussi, elles sont sous la menace quotidienne des assauts de cette coalition qui jure par la prise de Minembwe.

En effet, les Banyamulenges sont sous le siège comme du temps du Moyen-âge. Ils sont encerclés à Minembwe, attaqués de toute part pour que celui qui ne meurt pas de balles, meurt de faim ou de maladie. Et celui qui sort de ce siège de Minembwe meurt décapité. Cela est arrivé à Kananda à 8 kilomètres du territoire de Fizi, à Gandja, à Milimba, à lulimba etc.

La communauté Banyamulenge réfute sans réserve certaines fausses informations distillées dans l’opinion publique pour justifier la guerre de Minembwe.

a) l’argument selon lequel il s’agit d’une guerre interethnique.

La communauté Banyamulenge affirme n’avoir aucun problème particulier avec les communautés voisines. Elle rappelle qu’il a existé un programme du Gouvernement de traquer et éradiquer les groupes armés dont les Mai-mai, identifiés comme ennemis de la Nation. La question que l’on se pose est de savoir comment du coup, ces ennemis de la nation sont devenus une population civile des Babembe, Bafuliru et Banyindu révoltés !

b) l’argument selon lequel la guerre serait liée à la création de la commune de Minembwe.

La communauté Banyamulenge relève d’abord que cette commune a été créée avec tant d’autres en 2013 par le Gouvernement Matata, mais elle n’avait pas déclenché la guerre. Ensuite, le décret rendant opérationnelles certaines villes et communes rurales ne porte pas que sur Minembwe. C’est par le même décret que la ville d’Uvira, la ville de Baraka, la ville de Kamituga et tant d’autres entités fonctionnent aujourd’hui. Plus encore, les villages du groupement de Bijombo en territoire d’Uvira qui ont été incendiés en 2017 n’ont rien à voir avec la commune de Minembwe et ils ont été brûlés avant que ne soit signé ce décret portant opérationnalisation de quelques villes et communes rurales en décembre 2018. Tel est le cas des villages d’Itombwe dans le territoire de Mwenga et même ceux des autres secteurs du territoire de Fizi. Si la création de la commune de Minembwe par une décision du Gouvernement de la République posait problème, pourquoi ce sont les Banyamulenges qui doivent répondre et de surcroit être tués ?

Enfin, en quoi les groupes armés étrangers s’intéressent-ils de la création de la commune de Minembwe ?

De ce qui précède :

- La communauté Banyamulenge fait cette déclaration pour prendre date et prendre à témoin la communauté nationale et internationale sur les actes de génocide en exécution à Minembwe, pour que personne, devant l’histoire n’en prétexte ignorance ;

- Elle demande à l’Etat d’arrêter les massacres et le déracinement, ainsi que les assassinats ciblés contre les Banyamulenges dans la contrée ;

- Elle demande à l’Etat de la protéger, de protéger toute la population des Hauts plateaux et d’imposer la paix ;

- De traquer et éradiquer tous les groupes armés étrangers et locaux ;

- De déférer en justice tous les militaires qui ont trahi leur serment en collaborant avec les mai-mai et les officiers qui ont refusé aux militaires l’ordre de défendre et protéger la population civile ;

- De déférer en justice les hommes politiques, tireurs des ficelles et toute personne faisant apologie de la haine et de la guerre. Il en est de même de tous ceux qui font appel à la haine tribale, au génocide et à toutes sortes de traitement dégradant à travers les réseaux sociaux et d’autres médias ;

- D’organiser des opérations militaires de grande envergure en vue d’arrêter une fois pour toutes, ce phénomène d’épuration ethnique et ce, avec un commandement mixte..

- Elle demande à la Monusco de jouer son rôle de protéger les civils car jusque là elle assiste, elle aussi, en spectateur ;

- La communauté Banyamulenge annonce qu’elle ne prendra plus part à un quelconque dialogue tant que ces actes de génocide ne seront pas arrêtés et ce siège brisé ;

Enfin, tout en saluant l’engagement pris et la bonne volonté exprimée par Son Excellence Monsieur Président de la République, en vue de rétablir la paix et la sécurité dans les hauts plateaux de Minembwe, la communauté Banyamulenge demande au Chef de l’Etat, Commandant Suprême des Forces armées Congolaise et de la Police nationale de s’impliquer davantage pour protéger cette communauté en détresse.

Fait à Kinshasa, le 16 octobre 2019

Pour la Communauté Banyamulenge

Commentaires


bottom of page