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Conflit en RDC : Le Replis, Mercenaires, l’Entrée Triomphale du M23 à Goma et les Limites de l’Intervention Internationale

Paul KABUDOGO RUGABA

Ces derniers jours, des vidéos ont circulé montrant des replis de mercenaires russes et roumains impliqués dans le conflit en République démocratique du Congo (RDC). Parmi eux, on note également la présence de Français. D'autres vidéos montrent les forces armées congolaises tentant de coordonner leurs efforts autour de l'aéroport, épaulées par des mercenaires roumains.

Lors d'une récente réunion d'urgencedu Conseil de sécurité des Nations unies, les représentants des pays  qui ont fourni les contingents a la MONUSCO    ont confirmé que les forces du M23 disposent d'une puissance militaire supérieure à celle des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) et de leurs alliés. Ce constat, émanant d'experts sur le terrain, souligne l'ampleur du déséquilibre de FARDC et leurs alliés qui manquent une organaisation.

Dans ce contexte, certaines unités sud-africaines déployées dans la région ont été vues tirant en l'air et se filmant, une action perçue davantage comme une démonstration de présence que comme une véritable tentative de contenir la progression du M23. Malgré les promesses d'actions décisives en 48 heures, rien de concret n'a été réalisé pour stopper leur avancée.

Dans un tournant inattendu, le M23 vient d’entrer dans la ville de Goma sans effusion de sang. Bravo! Ce qui pourrait être perçu comme une victoire militaire s'est transformé en une scène de soulagement pour une population lassée par les abus et les tourments infligés par les FARDC, les milices Wazalendo et les mercenaires étrangers. L’accueil applaudi des troupes du M23 par les habitants de Goma soulève des questions importantes sur les dynamiques locales et les perceptions des forces en présence.

Depuis des années, les habitants de Goma subissent un climat de terreur : violations des droits humains, extorsions, et violences systématiques de la part de divers acteurs armés. L’arrivée du M23 est perçue comme un moment d’espoir, une opportunité de changement face à l’incapacité des FARDC à sécuriser la ville et à protéger les civils.

Les mercenaires étrangers, notamment russes, roumains, sud africains et français, présents aux côtés des FARDC et des milices locales, ont souvent été accusés d’exactions et d’une approche brutale. Leur présence n’a pas apaisé les tensions mais semble avoir exacerbé la méfiance de la population.

La réputation des FARDC et des milices Wazalendo auprès de la population est depuis longtemps entachée par des abus, un manque de discipline et une inefficacité chronique. Le soutien apporté par ces forces à des groupes armés comme les Maï-Maï, et le FDLR souvent responsables de massacres, a aggravé la situation sécuritaire.

En revanche, l’arrivée du M23 est perçue comme un moment de répit pour les habitants, qui espèrent un changement dans leur quotidien. Ce soutien populaire, ou du moins cet accueil apaisé, montre que dans ce conflit complexe, les lignes de légitimité ne se tracent pas simplement en fonction des alliances internationales mais aussi selon les réalités locales vécues par la population.

 

Les Débats au Conseil de Sécurité : Dialogue ou Condamnation ?

Pendant cette réunion, de nombreux acteurs internationaux – des États-Unis à la France, en passant par le Danemark, le Pakistan et la Corée – ont exprimé leurs positions. Tous s'accordent sur un point : la nécessité de privilégier le dialogue pour résoudre le conflit. Les condamnations, toutefois, sont multiples :

  1. ·   Le Rwanda est accusé de soutenir activement le M23.

  2. ·  La RDC est critiquée pour son soutien à des groupes armés tels que les FDLR  et les Maï-Maï.

  3. · Les processus de paix de Luanda et de Nairobi, aujourd'hui à l'arrêt, sont également pointés du doigt.

  4. ·  La violation répétée du cessez-le-feu est unanimement dénoncée.

Pour l'instant, aucune décision concrète n'a émergé de ces discussions, laissant place à une divergence d'opinions entre condamnations et appels à la négociation.

La Russie a adopté une position notable en déclarant que la crise actuelle en RDC est en grande partie un héritage de la colonisation. Selon les diplomates russes, les frontières tracées arbitrairement lors du partage colonial de l'Afrique constituent une "bombe à retardement" qui continue d'alimenter les conflits dans la région.

Cette déclaration met en lumière un aspect souvent ignoré dans les discussions internationales : les causes profondes de la crise. Les revendications du M23 et les griefs historiques liés à l'exclusion, à l'injustice et à l'accès aux ressources restent des éléments centraux à résoudre.


Quelles Perspectives pour le Conflit en RDC ?

Alors que la réunion au Conseil de sécurité se poursuit, les positions semblent converger vers une reconnaissance de l'urgence d'un dialogue inclusif. Cependant, l'absence de décisions concrètes pour mettre fin aux violences inquiète. Le conflit en RDC est bien plus qu'une opposition entre les FARDC et le M23 ; il s'agit d'une crise complexe enracinée dans des décennies d'injustices, de marginalisation et d'interférences internationales.

La question demeure : la communauté internationale prendra-t-elle enfin des mesures décisives pour résoudre ce conflit ou se contentera-t-elle de constater les dégâts ? Une chose est sûre : traiter uniquement les symptômes sans s'attaquer aux causes profondes ne fera que prolonger cette tragédie humanitaire.


Un Moment Historique Mais Fragile


L’entrée triomphale du M23 à Goma marque un moment charnière dans le conflit. Cependant, cette victoire symbolique pourrait être temporaire si des solutions durables ne sont pas trouvées. La communauté internationale devra tenir compte de plusieurs éléments :

  1. Le besoin d’un dialogue inclusif : La population de Goma a exprimé, par cet accueil, son besoin de sécurité et de stabilité. Les autorités congolaises et leurs partenaires doivent saisir ce message pour repenser les priorités et inclure toutes les parties prenantes dans une solution pacifique.

  2. La gestion des causes profondes du conflit : Les revendications du M23 – notamment sur la marginalisation, les droits des communautés, et les inégalités socio-économiques – doivent être examinées avec sérieux. Les solutions militaires à elles seules n’ont jamais suffi dans ce conflit multidimensionnel.

  3. La méfiance envers les acteurs internationaux : L’utilisation de mercenaires étrangers et la complaisance de certains acteurs internationaux ont alimenté la défiance des populations locales. La paix passe par des efforts crédibles, transparents et respectueux des populations concernées.


La situation à Goma reste volatile. Si l’entrée du M23 est saluée par la population, des tensions pourraient survenir si leurs attentes ne sont pas satisfaites rapidement. Ce moment de répit pourrait également être fragile si une intervention militaire internationale s’organisaient en réponse à cette avancée.

Il est temps pour le gouvernement congolais, les acteurs régionaux et la communauté internationale de reconnaître que la paix ne viendra pas par la force mais par une écoute active des doléances des populations locales et un engagement sincère envers une résolution des causes profondes du conflit.

Pour Goma, aujourd’hui, l’arrivée du M23 représente un espoir. Mais cet espoir devra être nourri par des actions concrètes et des efforts durables pour éviter de replonger dans un cycle de violences.

 

Le 26 janvier 2025

Paul KABUDOGO RUGABA

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